
Par Tabassum Siddiqui
Personne n’est mieux placé que Margaret McGuffin pour souligner les 50 ans de la CMRRA. Aujourd’hui directrice générale des Éditeurs de musique au Canada (ÉMC), elle a aussi travaillé pour la CMRRA de 2014 à 2017, d’abord comme vice-présidente, Stratégie et Développement des affaires, puis comme vice-présidente, Relations avec l’industrie et Communications.
Mme McGuffin, qui a collaboré avec la CMRRA comme consultante au début des années 2000, voit l’évolution de l’organisme comme une longue trajectoire d’engagement envers les auteurs-compositeurs, les auteures-compositrices, les éditeurs de musique et la communauté musicale.
« Je travaille depuis longtemps avec la CMRRA à différents titres — d’abord en tant que consultante, aidant à établir les premiers tarifs auprès de la Commission du droit d’auteur, ce qui était très important à l’époque », explique Mme McGuffin. Elle revient également sur la création de la CMRRA en tant qu’organisme chargé de l’attribution de licences pour les enregistrements musicaux au Canada : « À la base, un groupe d’éditeurs membres de notre association a décidé, il y a 50 ans, qu’il ne pouvait plus permettre à des organismes de gestion collective étrangers d’accorder des licences au Canada. Cette mesure visait à protéger les intérêts nationaux dans un marché d’éditeurs alors en plein essor. Aujourd’hui, on peut dire sans hésitation que cette initiative était judicieuse. »
La création de la CMRRA a essentiellement contribué à la mise en place de l’infrastructure de l’édition musicale au Canada, d’expliquer Mme McGuffin : « Pendant longtemps, au début de l’histoire de la CMRRA, les redevances mécaniques n’étaient que de deux cents [jusqu’en 1989]. C’est vraiment la CMRRA et les ÉMC qui ont obtenu du gouvernement de modifier cette licence obligatoire pour que les auteurs-compositeurs, les auteures-compositrices ainsi que les éditeurs de musique qui investissent en eux puissent être mieux rémunérés », précise-t-elle, en mentionnant que la licence obligatoire a été supprimée et que les redevances mécaniques sont maintenant négociées librement au Canada.
« En 50 ans, nous sommes passés du vinyle au CD, puis aux téléchargements et aux services de diffusion en continu. C’est ce que la CMRRA et l’industrie de l’édition musicale font le mieux : nous accueillons l’innovation et trouvons des moyens pour que les auteures-compositrices et auteurs-compositeurs soient rémunérés, rappelle Mme McGuffin. Au moment où les téléchargements sont entrés sur le marché, où la diffusion en continu a commencé et au moment de l’émergence de YouTube et Tik Tok, la CMRRA était aux avant-postes pour s’assurer que ces nouveaux services étaient couverts par des licences. La CMRRA a réellement innové en rassemblant les données les plus exhaustives sur les œuvres musicales, les parts de propriété, les enregistrements d’albums, tirées de leur historique de licences sur les produits physiques, et les rapports complets sur l’utilisation des FSN. Cette abondance de données permet d’effectuer des transactions financières rapides et précises pour sa clientèle. »
En tant que PDG des ÉMC, Mme McGuffin se concentre sur la défense des intérêts du secteur. Selon ses propres mots, elle « s’assure que le gouvernement comprend le rôle de l’édition musicale et qu’on entend notre voix ». Elle a été en première ligne pour observer l’évolution de la CMRRA au fil des ans et travaille toujours en étroite collaboration avec l’organisme, notamment en étant membre du Comité des éditeurs canadiens.
« Nous avons beaucoup de chance au Canada d’avoir la CMRRA et d’autres organismes de gestion de droits novateurs qui se préoccupent réellement des auteurs, autrices, compositeurs, compositrices et éditeurs de musique, et qui investissent dans la technologie nécessaire pour garantir que les gens sont rémunérés dans les délais prévus, se réjouit Mme McGuffin. La CMRRA a toujours été au cœur de toutes les discussions importantes sur l’évolution du secteur et sur la manière de s’assurer que toutes et tous sont rémunérés équitablement pour leur travail. »
L’histoire de la CMRRA est jalonnée de succès face aux défis posés par l’évolution rapide de la technologie et du marché, selon Mme McGuffin : « Les nouvelles technologies ont toujours été à l’avant-garde dans l’octroi de licences. Les Éditeurs de musique au Canada accordent actuellement une grande importance à l’IA et nous veillons à ce que les auteurs, auteures, compositeurs, compositrices et éditeurs de musique soient pleinement reconnus et rémunérés pour leur travail. »
« Nous avons vraiment besoin que les Canadiens et Canadiennes comprennent la valeur de l’art et du talent, et que le droit d’auteur permette aux artistes de poursuivre leur carrière et aux éditeurs de musique d’investir dans la nouvelle génération. Par conséquent, nous voulons nous assurer que nous percevons les futurs revenus issus de ces nouvelles technologies », ajoute-t-elle.
« Les choses évoluent très rapidement et la CMRRA a toujours été à l’écoute de sa clientèle pour comprendre les défis qu’elle rencontre sur le terrain. Le personnel sait vraiment écouter et est axé sur le client dans son travail de proximité en ce qui concerne la prise de décision. C’est tellement important d’avoir quelqu’un avec qui l’on peut vraiment échanger, plutôt que d’envoyer un simple courriel qui se perd dans les méandres de la messagerie électronique. »
Alors que Mme McGuffin se remémore l’histoire de la CMRRA et les nombreuses victoires qu’elle a remportées au fil des ans dans le domaine des droits musicaux, elle ne peut s’empêcher de penser à l’avenir. Comment l’organisme continuera-t-il à jouer un rôle essentiel en veillant à ce que les auteurs, auteures, compositeurs, compositrices et éditeurs de musique canadiens qui sont importants au pays et à l’étranger obtiennent la rémunération qu’ils méritent ? « Au Canada, nous excellons dans le domaine de l’édition musicale et nous nous assurons que les enregistrements canadiens soient diffusés à l’échelle mondiale », affirme-t-elle.
« Les ÉMC viennent de dévoiler leurs statistiques pour 2024 et constatent que 82 % des revenus des éditeurs indépendants canadiens proviennent de sources étrangères. Ils manifestent ainsi un intérêt marqué pour le marché canadien, mais les éditeurs canadiens exportent également leurs auteurs-compositeurs et auteures-compositrices dans le monde entier pour travailler en Corée, en Europe ou à Los Angeles », ajoute la battante.
« Nous le constatons clairement dans la liste des nominations pour la nouvelle catégorie “Auteur-compositeur de l’année (non-exécutant)” reconnue aux prix JUNO de cette année. Il s’agit d’une reconnaissance très importante de ce que font nos artistes et éditeurs canadiens, non seulement au Canada, mais aussi dans le monde entier. »
En tant que chef de file du secteur de l’édition, Mme McGuffin apprécie le fait que le personnel de la CMRRA participe aux activités des ÉMC, comme le programme de mentorat NXTGen destiné aux jeunes professionnels.
« J’apprécie beaucoup la collaboration avec la CMRRA, qui est toujours un partenaire de choix. Je suis convaincue que la collaboration sera la clé pour surmonter tous les défis et saisir toutes les occasions qui se présentent à nous. » Elle souligne également l’événement annuel Inside the Song, une initiative mixte organisée à Toronto par les ÉCM, la CMRRA et la CARAS/Les Prix JUNO, au cours de laquelle les auteurs-compositeurs et auteures-compositrices présentent les histoires inspirantes qui se cachent derrière leurs chansons. « Tous les acteurs de l’industrie canadienne doivent travailler de concert. La CMRRA a toujours assuré un rôle de leadership et continuera certainement à le faire, car elle travaille étroitement avec les auteurs-compositeurs, auteures-compositrices et éditeurs d’aujourd’hui et de demain. »