par Isabelle Speerin
La passion de Trina Smith-Dort pour les puzzles est plus qu’un simple passe-temps. C’est une vraie compétence qui l’aide à faire face aux exigences de la communauté musicale compétitive de Nashville avec aisance. À la tête de Me Gusta Music, société d’édition et de gestion de disques indépendante et exclusivement féminine, elle est toujours prête à relever les défis complexes qui font partie du boulot.
Mme Smith-Dort est diplômée de la Middle Tennessee State University (MTSU) à Nashville, où elle a suivi le cursus du baccalauréat en sciences de l’enregistrement au début des années 2000. Largement considérée comme l’une des meilleures écoles en administration musicale aux États-Unis, la MTSU est également connue sous le nom de « fabrique de gagnants de prix Grammy » en raison de l’abondance des nominations et des victoires de ses anciens diplômés et diplômées. « J’ai su très vite que je voulais travailler dans le secteur de la musique, mais je ne savais pas où j’allais aboutir parce que j’ignorais que l’édition existait », explique-t-elle.
Dans le cadre de ce programme, Mme Smith-Dort a effectué des stages dans plusieurs sociétés musicales, mais c’est au cours de son passage à l’American Society of Composers, Authors and Publishers (ASCAP), sous la direction de feu Connie Bradley et Pat Rolfe, qu’elle décroche son premier emploi dans le domaine de l’édition à Create Real Music (aujourd’hui Big Loud). « Au début, je pensais que je ferais de la création, puis j’ai rapidement réalisé que je faisais partie des intellos », dit-elle en riant. Elle se lance ensuite dans l’administration des droits d’auteur chez Words & Music (aujourd’hui Hipgnosis), à Nashville, où elle passe six ans à titre de directrice des services administratifs.
Toujours prête à relever de nouveaux défis, Mme Smith-Dort y voit l’occasion de cibler un marché de niche à Nashville, désespérément en quête de soutien administratif. « J’ai remarqué que les genres musicaux country du Texas et red dirt que j’aime personnellement écouter n’étaient tout simplement pas desservis à Nashville à l’époque », signale-t-elle.
C’était le catalyseur dont elle avait besoin pour se diversifier et fonder sa propre société indépendante d’édition et d’administration de disques en 2011. « Nous nous concentrons sur la synchronisation, et notre clientèle est constituée de groupes qui sortent leur propre musique, de préciser Mme Smith-Dort. Nous travaillons également pour le compte d’éditeurs de musique pour leur donner un coup de pouce. »
Aujourd’hui, Me Gusta Music est devenue une entreprise prospère entièrement féminine qui s’est développée organiquement jusqu’à une équipe de dix personnes et qui a pignon sur rue à East Nashville. Son équipe aide la clientèle dans la perception des revenus de redevances provenant des synchronisations, des licences mécaniques, des prestations et du streaming numérique. « Au fur et à mesure de notre évolution, il a été très important pour moi de garder une bonne équipe, confie-t-elle. Je me préoccupe davantage de bien intégrer les employées à notre équipe pour les former au vrai travail de terrain. »
Me Gusta Music peut se targuer d’avoir une clientèle diversifiée en matière d’édition et d’administration de disques, notamment Alanis Morrisette, Backstreet Boys, Jonas Group Publishing, Michael Franti, Say She She, The Aces, Luis Resto, Mat Kearney, Nikki Lane, Darrell Scott, Cody Johnson, Caitlin Rose, Bonnie Baker, Kent Blazy, David Nail et Cody Jinks. Une grande partie de sa clientèle connaît une nouvelle vague de popularité grâce au succès de la série télévisée américaine néo-western Yellowstone, dont la bande-son regorge de chansons country.
Mme Smith-Dort se distingue de la concurrence en établissant avec ses clients et clientes une relation privilégiée fondée sur des attentes honnêtes et réalistes. « Mon but n’est pas de vendre à outrance, dit-elle. J’explique précisément ce que nous faisons et ce que nous pouvons faire, et j’ai l’impression que notre clientèle sait exactement à quoi s’en tenir dans cette relation professionnelle. »
Elle s’enorgueillit du fait que Me Gusta Music travaille délibérément avec tous les types de musique et n’est pas « uniquement country », comme beaucoup d’autres sociétés musicales établies à Nashville. « Nous faisons de la musique alternative et nous avons un peu de country grand public, mais nous administrons une grande variété de musiques et je pense que cela nous rend un peu différentes. »
L’une des premières choses que Mme Smith-Dort a faites, lorsqu’elle a démarré son entreprise il y a 13 ans, a été de s’affilier à la CMRRA. « Je sais pertinemment à quel point il est important pour nous de pouvoir percevoir ces redevances, affirme-t-elle. Avoir la possibilité d’être un client direct de la CMRRA et de s’assurer que les titres sont adéquatement enregistrés est d’une importance inestimable pour notre clientèle. Caroline Ives et Marianne Anderson sont toujours là pour nous aider. »
Mme Smith-Dort signale également la façon dont la CMRRA continue de mettre à jour les processus pour inclure les soumissions en format CWR, ce qui rend les enregistrements de catalogues plus faciles et plus rationnels. « Nous apprécions le fait que la CMRRA est toujours prête à revoir et à améliorer le processus de transfert des catalogues et des titres », ajoute-t-elle.
Lorsqu’on lui demande quels sont les défis auxquels elle est confrontée sur le plan de l’administration, Mme Smith-Dort mentionne le manque de cohérence dans la manière dont les informations sont partagées entre partenaires de l’industrie. « Notre plus grande préoccupation est de nous assurer que nos chansons sont enregistrées correctement dans le monde entier et que nous sommes rétribuées pour cela, car il s’agit de l’argent de nos clients et clientes », fait-elle remarquer.
Elle évoque la nécessité de s’adapter constamment à l’évolution des conditions du marché : « Il faut constamment nous adapter, et rester flexibles pour comprendre rapidement que tel modèle ne fonctionne plus, que tel produit n’est plus fabriqué ou que telle nouveauté apparaît sur le marché. »
Pour quiconque cherche à se tailler une place dans l’industrie musicale, Mme Smith-Dort souligne l’importance de fréquenter une école réputée : « Je pense qu’il est utile d’apprendre les différents aspects de l’industrie dans le cadre d’un programme universitaire, dit-elle. Nous trouvons que cela aide vraiment à préciser ce que l’on veut faire. »
Les stages sont également importants pour bâtir de futures relations professionnelles, en particulier à Nashville. « C’est une grande et une petite communauté à la fois, et il est donc très utile d’avoir une longueur d’avance sur quelqu’un qui a déjà le pied à l’étrier. »
Aux créateurs et créatrices, elle recommande d’assister à des conférences sur la musique pour les aider à mieux cerner la portée de leur travail en tant qu’auteur-compositeur, autrice-compositrice ou artiste : « Il peut être difficile de s’y retrouver dans l’écosystème des redevances, c’est pourquoi les conférences sont utiles pour comprendre certains concepts généraux. »
Mme Smith-Dort est trésorière du chapitre de Nashville du conseil d’administration de l’AIMP (Association of Independent Music Publishers) et a été récompensée pour sa contribution à l’industrie musicale par le prix AIMP Nashville Song Champion of the Year en 2022. Elle est la seule professionnelle du domaine de l’administration musicale à avoir reçu ce prix.
Pour en savoir plus sur Smith-Dort et Me Gusta Music, visitez le site Me Gusta Music.