Par Isabelle Speerin
Un récent rapport du Forum économique mondial révèle qu’il faudra 132 ans pour combler l’écart entre les sexes. Bien que cela semble être une éternité, Robyn Stewart, vétérane de l’industrie, n’est pas du genre à reculer devant un défi.
Mme Stewart est un visage familier pour de nombreux membres de l’industrie musicale, en particulier dans l’Ouest canadien, où elle a passé huit ans comme directrice générale de BreakOut West et de la Western Canadian Music Alliance (WCMA).
Elle est maintenant à la tête de Women in Music Canada (WIMC), l’une des plus grandes associations de l’industrie de la musique au Canada, un rôle qui concilie parfaitement sa passion pour l’équité entre les sexes et son désir de soutenir les nouveaux talents. « C’était un rêve de pouvoir travailler à temps plein à tous les projets passionnants liés à l’égalité des sexes que j’aimais le plus dans mon travail à la Western Canadian Music Alliance », confie-t-elle.
Mme Stewart a commencé sa carrière comme régisseuse de plateau pour le Manitoba Theatre for Young People peu de temps après avoir obtenu un diplôme de l’Université du Manitoba au début des années 2000. « Je suis tombée dans la musique quand on m’a demandé de soutenir la Prairie Music Week, qui est devenue par la suite les Western Canadian Music Awards (WCMA), explique-t-elle. C’était le début d’une relation de travail qui a duré de nombreuses années. Je suis avec les WCMA depuis leur création, ajoute-t-elle. J’y ai en quelque sorte grandi et j’ai occupé diverses fonctions au fil des ans. »
En 2009, Mme Stewart s’établit à Vancouver pour rassembler plus de 250 artistes musicaux à titre de coordonnatrice du programme des célébrations entourant les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2010 à Vancouver. « C’était tellement gratifiant de choisir des artistes que le monde ne connaissait pas encore, de leur donner de vrais cachets d’artistes et de les faire monter sur scène devant de vastes auditoires, se rappelle-t-elle. C’était le meilleur job qui soit. »
Après les Jeux olympiques, l’entrepreneuse devient directrice générale de la Coastal Sound Academy, avant de revenir à Winnipeg, où elle met ses talents au service de l’Ambulance aérienne STARS, du comité d’accueil des prix JUNO de Winnipeg et du comité organisateur des Jeux panaméricains et parapanaméricains de Toronto.
Elle supervise maintenant tous les aspects de Women in Music Canada, y compris les événements éducatifs, de perfectionnement professionnel et de réseautage, ainsi que la programmation, l’engagement de l’industrie et la défense des intérêts. « Mon objectif est de créer une association qui soutienne un bassin de talents pour une carrière dans la musique, du début jusqu’aux échelons supérieurs, et qui soit à la fois sûre, accessible et fructueuse », explique-t-elle.
L’une des initiatives qu’elle cherche à développer est le populaire programme d’accélération pour les entrepreneuses et entrepreneurs de l’organisme, conçu pour soutenir la prochaine vague de créatrices et de leaders de l’industrie canadienne féminine et de diverses identités de genre.
« Je veux développer ce programme pour répondre aux besoins, car les soumissions ont triplé par rapport à l’année dernière. Nous avons également ajouté le mentorat en réponse aux commentaires des années précédentes », dit-elle.
La CMRRA est fière de soutenir le programme de Women in Music Canada et des initiatives telles que le programme d’accélération, qui contribuent à mettre en valeur les éditrices et les éditeurs de musique tout comme les autrices-compositrices indépendantes ou de genre différent.
En l’honneur de la Semaine internationale de la femme, WIMC présente une série d’ateliers et de conférences à Toronto le 7 mars. Les séances sont gratuites et abordent, outre des conseils financiers, juridiques et administratifs pour le secteur de la musique live, des sujets tels que comment s’engager dans les nouvelles technologies et les bonnes pratiques en matière de cyberhygiène, et comment se préparer à l’exportation. La CMRRA est ravie d’être partenaire d’un atelier de l’événement.
Mme Stewart inaugure également le programme Women in Music Canada Honours le 8 mars à l’Opera House de Toronto pour reconnaître, honorer et soutenir les créatrices et les chefs de file féminines.
« Il y a des leaders féminines incroyables au Canada, mais elles sont en nombre insuffisant, affirme-t-elle. Notre communauté est trop petite, surtout dans des domaines comme la production live. Nous voulons souligner l’excellent travail accompli et soutenir le nombre croissant de postes occupés par des femmes et des personnes de genre différent dans tous les domaines de l’industrie de la musique. Nous voulons aussi faire remarquer davantage le travail de mentors ambitieux pour ceux et celles qui font leurs premiers pas dans l’industrie. »
Bien qu’elle se soit concentrée sur les programmes et les événements de l’industrie au cours des six premiers mois de son mandat, Mme Stewart souhaite porter maintenant son attention sur les artistes et les créatives et les créatifs puis trouver des moyens d’établir des liens significatifs entre tous les membres.
« Je pense que l’une des choses que nous avons le plus perdues avec la COVID-19 est la capacité de s’engager dans quelque chose de nouveau, dit-elle. Les gens étaient assez désireux de sauter sur un appel Zoom avec des personnes qu’ils connaissaient déjà, mais ouvrir leur cercle à de nouvelles personnes, à de nouvelles opinions, à de nouvelles inspirations semblait plus difficile. »
Lorsqu’on lui demande comment l’ère numérique a influé sur la manière dont nous interagissons avec les créatrices et créateurs, Stewart répond qu’elle est souvent impressionnée par la rapidité avec laquelle les tendances virales ont changé la façon de dépister les talents.
« Il y a quelques années, quand j’étais acheteuse, il fallait que les artistes aient un site Web, s’entourent d’une équipe venant de l’industrie et prouvent leurs succès de tournée, dit-elle. Et aujourd’hui, il faut avoir de l’influence dans les médias sociaux. »
Selon Mme Stewart, le fait que les artistes soient tellement accessibles sur les plateformes numériques signifie qu’il y a beaucoup plus de bruit autour d’eux, mais elle pense que la capacité d’une créatrice ou d’un créateur à partager des histoires personnelles authentiques est le meilleur moyen de se démarquer. « La transparence est un facteur important. Si vous avez la passion de quelque chose et que vous pouvez la transmettre aux autres sans rien falsifier, vous augmenterez certainement l’engagement. »
D’un autre côté, elle reconnaît que l’authenticité suscite une certaine crainte, surtout lorsque l’information peut être transmise instantanément sur les plateformes numériques à l’infini.
« Cela suscite davantage de peur, ajoute-t-elle. Et si vous avez peur de ce que vous allez dire et de la façon dont cela va être reçu — en tant qu’artiste, créateur ou interprète public —, cela peut se répercuter sur votre santé mentale. »
Ce qui donne de l’espoir à Robyn Stewart, c’est que tous les ordres de gouvernement s’intéressent à la diversité, à l’équité et à l’inclusion, ce qui constitue une occasion en or pour tout le monde, et non seulement pour ceux et celles qui appartiennent à des groupes en quête d’équité. « Selon moi, dans 10 ans, nous embaucherons les meilleures personnes et elles seront un mélange de tous les groupes démographiques, affirme-t-elle. Mais nous n’en sommes pas encore là. »
Mme Stewart habite actuellement à Winnipeg avec son mari et sa famille. Elle siège aux conseils d’administration du prix de musique Polaris et de l’Association canadienne de la musique sur scène en plus de présider le conseil consultatif de la Fondation manitobaine des maladies du cœur.
Pour en savoir plus sur Women in Music Canada ou pour vous inscrire à son répertoire, visitez www.womeninmusic.ca.