(La version en anglais de cet article fut publié à l’origine dans le e-bulletin du 22 février 2016 Music Publisher Canada).
En entrevue avec Embassy, une publication d’Ottawa qui traite des politiques canadiennes dans une perspective internationale, Robert Hutton, directeur général de l’Association canadienne des éditeurs de musique (CMPA), a affirmé catégoriquement que la mise en place d’un mécanisme d’enregistrement des droits d’auteur, plutôt que la prolongation de 20 ans de la durée du droit d’auteur, telle qu’elle est prévue par le Partenariat transpacifique (PTP), serait injuste pour les titulaires de droits.
«Les œuvres musicales qui demeurent en circulation auront toujours une certaine valeur commerciale», a souligné Hutton. «Par exemple, n’importe quelle chanson jouée par un service Web de diffusion en continu aura une valeur commerciale pour celui-ci, car il tire des recettes de la publicité ou des abonnements. Les titulaires de droits doivent être en mesure d’avoir leur part de ces recettes sans avoir à faire toutes sortes de contorsions pour s’enregistrer. »
La prolongation de la durée du droit d’auteur, pour la porter à 70 ans après la mort du créateur, permettrait d’harmoniser cette durée avec celle en vigueur dans quelque 80 pays du monde. Cette question a fait l’objet d’un vif débat au cours des pourparlers sur le PTP, qui a été signé au début de février par des ministres des 12 nations membres, dont la ministre canadienne du Commerce international Chrystia Freeland. Chaque pays a maintenant deux ans pour décider de ratifier ou de rejeter l’entente.
Avec un éventuel mécanisme d’enregistrement, les titulaires de droits d’auteur seraient tenus de s’enregistrer, à l’aube du 50e anniversaire du décès du créateur, pour bénéficier des 20 années supplémentaires de protection. Ce système permettrait de filtrer les œuvres qui ne sont plus viables sur le plan commercial. En vertu de la Convention de Berne, de laquelle sont parties tous les membres du PTP, la protection du droit d’œuvre demeure valide pendant toute la vie de l’auteur et pour une période de 50 ans suivant son décès. Elle interdit en outre l’imposition de « formalités », un terme juridique qui viserait le système d’enregistrement. Comme le fait remarquer Howard Knopf, avocat spécialisé dans le droit d’auteur, dans le même article d’Embassy, on ignore si cette interdiction se prolonge au-delà des 50 années de protection. En outre, cette ambiguïté risque d’entraîner des contestations judiciaires sur le fondement que l’imposition d’un mécanisme d’enregistrement viole la Convention de Berne et le texte du PTP.
Le PTP, dont la préparation s’est échelonnée sur cinq ans (bien que le Canada se soit joint tardivement aux pourparlers), a été signé par 12 nations membres qui représentent près de 40 % de l’économie mondiale. Pour que l’entente soit ratifiée et entre en vigueur, le texte législatif devra être accepté par les États-Unis et le Japon — deux pays où auront lieu des élections cette année —, ainsi que par au moins quatre des dix autres pays membres, à savoir le Canada, la Malaisie, le Vietnam, Singapour, Brunei, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Mexique, le Chili et le Pérou.