par Isabelle Speerin
Le plus souvent, le week-end, on trouve Jim Selby, directeur de l’édition de Concord, dans son garage en train de peaufiner des réglages et de polir des motos qu’il adore démonter et réagencer. Ce désir de comprendre le fonctionnement des choses et d’en optimiser la performance le guide dans son rôle à la tête de la division de l’édition musicale de Concord. « J’adore réparer les choses, explique-t-il. C’est une passion de comprendre comment les choses fonctionnent, de les disséquer et de les améliorer, et donc, naturellement, cela transparaît dans ma carrière. »
Actuellement établi à Nashville, au Tennessee, Selby est originaire d’Elmira, en Ontario, à environ une heure et demie à l’ouest de Toronto, une petite ville réputée pour son charme, son festival du sirop d’érable et sa population mennonite de vieille souche. Son père était le boucher local.
Premier membre de sa famille à avoir obtenu un diplôme universitaire, Selby a fréquenté le Conestoga College sur le campus de Guelph, en Ontario, à la fin des années 1980, pour étudier dans le domaine de l’industrie automobile dans le cadre du programme portant sur les groupes motopropulseurs. « C’était à la fin des années 1980, alors que l’industrie et la construction automobiles connaissaient un véritable boom, dit-il. Mais j’ai compris après avoir obtenu mon diplôme que je ne voulais pas travailler pour un constructeur automobile. »
Au lieu de cela, Selby décroche un emploi dans la comptabilité pour une société de distribution à Toronto, où son plus gros client est un distributeur de musique. « Nous distribuions un label classique à petit budget appelé LaserLight, explique-t-il. C’était important pour nous et je me suis familiarisé avec le fonctionnement du catalogue et la façon de gagner de l’argent. »
Deux ans plus tard, il quitte son emploi pour lancer une société de distribution de musique avec son ancien client, qui venait de réaliser une fusion avec son plus grand concurrent. « J’étais un passionné de musique, c’est pourquoi je me suis lancé dans le métier et c’est la raison pour laquelle je me suis si bien entendu avec les gars de la musique, dit-il. J’ai toujours eu de l’affection pour les auteurs-compositeurs. »
Il s’installe aux États-Unis lorsqu’il se fait offrir un poste chez le puissant label et distributeur de musique classique Naxos of America. Il y passe 16 ans, dont 6 en tant que PDG. Il recentre ses activités pour travailler pour le géant de l’édition Ole Media Management (aujourd’hui connu sous le nom d’Anthem Entertainment) comme premier vice-président du numérique.
En 2016, Selby devient directeur général du Concord Music Group. Il est ensuite promu directeur général du financement et directeur de l’exploitation avant d’occuper ses fonctions actuelles de directeur de l’édition. « J’ai touché à tous les aspects de la société, de la musique d’enregistrement à la gouvernance, jusqu’à l’édition pendant environ six ans, remarque-t-il. Il n’y a pas de journée type chez Concord. »
Avec son siège social à Nashville, Concord Music Publishing représente plus de 600 000 œuvres musicales protégées par les droits d’auteur, dont le plus grand catalogue classique au monde, Boosey & Hawkes. Concord regroupe également les catalogues d’Irving Berlin, Benny Blanco, Sammy Cahn, Phil Collins, John Fogerty, George Harrison, Imagine Dragons, Iron Maiden, Cyndi Lauper, Pink Floyd, Trent Reznor, Santigold, Pete Seeger et Nikki Sixx. Parmi les auteurs-compositeurs qui figurent actuellement sur sa liste, mentionnons Fiona Bevan, BIA, Jason Robert Brown, Chase + Status, Cautious Clay, James Earp, Daniel Lanois, Oh Wonder, Steve Robson, Mark Ronson, Varren Wade, Tion Wayne et Yola.
Concord Music Publishing détient également le catalogue de Rodgers & Hammerstein, l’une des collaborations compositeur-parolier parmi les plus fructueuses du théâtre musical populaire, à la base de l’activité théâtrale florissante de Concord. Ce duo américain a créé 11 comédies musicales primées dans les années 1940 et 1950, parmi lesquelles Oklahoma, South Pacific et The Sound of Music. My Favorite Things, interprétée par Julie Andrews dans la version cinématographique de 1965 de la comédie musicale de Broadway, est l’une des chansons les plus emblématiques et les plus lucratives de The Sound of Music. « Cette chanson a bénéficié d’une durée de vie incroyable, d’abord lorsqu’elle a été lancée dans la production de Broadway, puis dans le film musical et des publicités pendant de nombreuses années », explique Selby.
Puis, en 2019, la chanson à succès d’Ariana Grande, 7 Rings, est lancée sur le marché. La chanson a été écrite par Grande et ses amies Victoria Monét, Tayla Parx, Njomza Vitia et Kaydence. Les producteurs Tommy Brown, Charles Anderson et David Foster ont également été crédités pour leurs contributions. Mais, et c’est peut-être le plus important, les ayants droit de Rodgers & Hammerstein ont perçu des droits d’auteur parce que la mélodie emblématique My Favorite Things constitue une part captivante, essentielle et centrale de la chanson. 7 Rings a eu un impact énorme, en première place du classement Billboard Top 100 et a battu des records de streaming sur Spotify, tout en faisant découvrir My Favorite Things à une toute nouvelle génération de fans. « Nous sommes toujours en quête d’artistes pour réinterpréter et moderniser ces chansons classiques pour les nouvelles générations, affirme Selby. C’était l’un de nos objectifs et nous avons réussi à l’atteindre avec cette chanson. »
Selby mentionne que l’excellence opérationnelle est un élément moteur chez Concord. « Nous cherchons continuellement à rationaliser les processus et à nous assurer que nous avons une longueur d’avance en matière de licences de nouveaux médias. » L’entreprise a connu ses premiers succès en investissant dans des plateformes telles que Techstars — une pépinière mondiale qui comprend un programme d’accélération en musique —, où elle encadrait aussi les participants. « Les fondateurs de certains de ces organismes sont vraiment extraordinaires, confie-t-il. Nouer des relations avec eux au début de leur carrière est extrêmement important pour nous. »
Dans le but de maintenir cette attention portée aux futurs innovateurs, Selby a formé un comité d’investissement dans les technologies musicales pour analyser les technologies musicales dans lesquelles l’entreprise souhaite investir ou éventuellement utiliser comme fournisseur. « Nous sommes constamment attentifs à ce qu’ils font et nous nous demandons s’il s’agit de quelque chose que nous pourrions utiliser pour Concord, déclare-t-il. Que cela nous plaise ou non, la technologie va changer nos activités. »
Alors que de nombreuses sociétés musicales développent chaque secteur de l’industrie musicale en une division distincte, parfois hébergée dans des lieux différents, Concord regroupe délibérément ses divisions d’enregistrement, d’édition et de théâtre sous un même toit dans ses six bureaux dans le monde, dont des points d’ancrage à Londres et Berlin. « Notre vision est tellement différente, dit-il. Nous nous considérons en fait comme une seule et même entreprise : nous n’avons pas de bureaux séparés pour l’édition, les labels d’enregistrement et la gestion de l’entreprise — nous sommes tous dans le même bâtiment. »
Le dirigeant ajoute que Concord passe également beaucoup de temps à former les employés qui travaillent dans ses différents services afin d’établir des liens, de favoriser une meilleure compréhension de tous les domaines d’activité de Concord et de rationaliser davantage les opérations. « C’est quelque chose qui nous distingue de nos concurrents, car, si vous nous comparez à d’autres grandes entreprises, elles sont toutes très cloisonnées. »
La relation de Jim Selby avec la CMRRA remonte au début des années 1990. Il reconnaît que l’Agence l’a aidé à comprendre comment enregistrer les droits d’auteur et payer les redevances à temps : « La CMRRA est une partie intégrante de la culture musicale canadienne et a accompli un travail fantastique en se réinventant dans un environnement souvent difficile. »
Jim Selby a récemment été nommé au comité des éditeurs canadiens de la CMRRA, lequel supervise et donne son avis sur les décisions de l’agence en matière de licences collectives. Il siège également au conseil d’administration de la National Music Publishers’ Association.
#dINFLUENCE Les éditeurs sont au cœur de l’industrie de la musique. En 2021, nous présenterons 11 d’entre eux. Nous parlerons aussi de chansons. Nous sommes conscients qu’il n’existe pas de mesure universelle pour quantifier le succès d’une chanson; c’est pourquoi nous aborderons toutes les façons inimaginables de quantifier leur influence — des chansons qui ont déclenché des révolutions, lancé des mouvements, été catalyseuses de changements, donné naissance à des histoires d’amour ou qui ont tout simplement été une source d’inspiration.
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